L’existence répand à tout vent des naufrages.
Son souffle administre bonheurs comme tourments.
Nul ne peut songer échapper à ses orages,
Ils laissent derrière eux un gouffre d’errements.
Tapi en silence, chacun se barricade :
Le malheur pétrifie, comment le surmonter ?
Même celui d’autrui pousse à la dérobade,
Par peur d’être souillé, de devoir l’affronter.
Aujourd’hui cependant, il se tient à ma porte,
Son visage à l’abri d’un boniment sournois.
Je défaille, meurtri d’attaques en cohorte,
Flèches de désarroi tirées de son carquois.
Dans son acharnement, il a jeté la force
D’une vague de fond, ce laminoir puissant.
Il me laisse exsangue de son baiser atroce,
Encore en vie pourtant, miracle étourdissant.
Sors de cette gangue ! crie mon âme en détresse.
Stupide gageure ! réfute ma raison.
Ce dilemme muet exhale sa caresse,
Onde vénéneuse au redoutable poison.
Mes amis m’arrachent de ma piètre posture,
M’offrent du miel goûteux, un rayon de douceur.
Ils ravivent ce feu dispersant la froidure,
Me poussent gentiment à chasser ma torpeur.
Je me redresse alors, droit dans ma plénitude,
Les yeux levés au ciel pour le prendre à témoin :
Ce cadeau altruiste demande gratitude,
Le transmettre à mon tour à ceux dans le besoin.
Quoi de plus généreux : relayer sa sagesse,
Dispenser sa chaleur à celui qui a froid…
Procurer courage, quand la douleur oppresse,
Recevoir et donner, ainsi je le conçois.