J’ai oublié de te dire…

(6 pieds)

J’ai oublié d’écrire,
Dire ce qui déchire
Pour que dans un soupir
Revienne mon sourire.

Oublié de rêver,
Le cœur tout entravé
De l’angoisse larvée
Qui n’a rien préservé.

Oublié tant de joies,
Dans une vie sans choix
Emplie de désarroi
Où rien ne se conçoit.

Mais tout est différent,
Devenu cohérent,
Ton amour conquérant
Tout autant rassurant.

Plus question de flétrir,
De me laisser meurtrir,
Puisque dans un soupir
Tu cours vers mon sourire.

Voie du plaisir par ta voix

8 pieds

Quelque part s’élève ta voix.
Son timbre grave se pourvoit
De frémissements qui louvoient
Vers mon désir, trouvent leur voie.

Voie ouverte aux tonalités.
Sombres et chaudes, habitées
De cette sensualité
Flambeau de ta virilité.

Virilité qui me transcende.
Certes, muette est ma demande,
Mais tout mon être te quémande,
Tu sais combien je suis friande.

Friande de tes inflexions.
Elles servent tes intentions…
Je succombe à ta séduction,
Certaine de mon intuition.

Cœur à l’abandon

6 pieds

Un grain d’indécision,
Un soupçon d’allusion,
Le doute à profusion,
Annoncent l’érosion.

L’érosion de l’amour,
Qui vous prend à rebours,
Et surtout sans détour,
Empêchant tout retour.

Retour cruel de flamme,
La vie devient infâme,
Quand silence de l’âme
Et du cœur s’amalgament.

Désenchantement

6 pieds

J’ai posé sur ta bouche
Ma plus belle escarmouche,
Mais un rien t’effarouche
Je n’ai donc pas fait mouche.

J’ai posé sur ton cœur
Un drapeau de vainqueur,
Mais toi d’un air moqueur
M’as traité de dragueur.

J’ai posé sur ton sein
Un sourire à dessein,
Mais ton air assassin
M’accuse de larcin.

Renoncer à ton charme,
C’est ce qui me désarme.
Et soudain une larme,
Je dépose les armes…

Ton sourire rime avec désir

Rondel
(Octosyllabes – A1/B2/B/A – A/B/A1/B2 – A/B/B/A/A1)

Ton sourire me fait désir,
Tes lèvres ardentes m’appellent,
Le mot amour elles épellent,
Les miennes veulent s’en saisir.

Tes arguments me font rosir
Et s’invitent comme un rappel.
Ton sourire me fait désir,
Tes lèvres ardentes m’appellent.

Je succombe à notre plaisir,
Nous le buvons dans la coupelle
De l’amour qui nous interpelle
Sans plus d’artifice à choisir.
Ton sourire me fait désir.

L’écrivain-musicien

« Sans la musique, la vie serait une erreur. » (Nietzsche)

Quelques mots réunis, somme toute banals,
Voilà pourtant un poème qui voit le jour.
Tout en mélodie, il agit comme un fanal,
Un appel à l’écouter qui émeut toujours.

Sur le seuil de la première ligne s’entrouvre
Le monde de la musique, lieu amical.
L’écrivain-musicien compose, se découvre
Derrière l’entrelacs de phrases musicales.

Il orchestre la partition de son rondeau,
Tel un maestro ou un éminent pianiste.
Dans la Mer des Alexandrins, sur son radeau,
Officie l’écrivain, mystérieux alchimiste.

Tout le nourrit : ce qu’il voit, entend et respire
Apporte les ingrédients de sa création. 
Métamorphosant les émotions qui l’inspirent,
Ce musicien crée avec imagination.

De tous les émois, il en est le réceptacle,
Devient un grenier inépuisable de rêves.
Sa sensibilité, élevée au pinacle,
Peut pourtant le blesser, agissant comme un glaive.

Il jongle avec les mots, joue à l’équilibriste
Avec leurs rythmes qui impulsent la cadence.
Il plonge avec délice dans ce jeu de piste,
Guidé par d’infinies palettes de nuances.

Parfois étonné par son inventivité,
Il s’obstine dans sa quête de perfection. 
À d’autres moments, manquant d’objectivité,
Il ressent l’abandon de son inspiration.

Posant sa partition avec soulagement
Autant qu’avec regret, il en a terminé.
Sa symphonie guide vers des raffinements
Où, médusés, nous nous laisserons fasciner.

De vers et de notes, surgit un paysage,
Source d’émerveillement pour tout auditeur.
L’écrivain-musicien a gagné : un passage
Au cœur même des émotions du visiteur.

Jalousie

Deux sonnets écrits autour d’un même thème, mais avec un registre de langage différent.

Sonnet pour chien précieux

Invraisemblable ! Il est parti ce matin
Sans un regard pour moi, d’un pas précipité.
Depuis, l’angoisse dilue sa toxicité,
Privé de raison d’être, je suis un pantin.

Hier soir pourtant, près du feu, ses yeux de satin
Me promettaient à jamais sa fidélité.
En plein bonheur, je manquai de lucidité,
Préférant garder son amour comme un butin.

En vain l’horloge pousse le temps qui s’étire…
Une vérité commence à m’anéantir,
Elle lacère mon univers où tout bouge.

Je sais maintenant l’existence d’un rival…
Muet, sans puce, aux courbes d’un bel ovale,
Mon maitre a acheté un affreux poisson rouge…


Sonnet pour un cabot

Je pige plus rien ! Il s’est barré ce matin
Sans me donner mon os, d’un pas précipité.
Depuis, je ne trouve pas ma tranquillité,
Me serais-je montré un peu trop cabotin ?

Hier soir pourtant, près du feu, ses yeux de crétin
Me promettaient croquettes jusqu’à satiété.
Crédule, je vivais dans la docilité,
Doucement conforté par son baratin.

Soudain la vérité aveuglante me terrasse,
Tel un Saint-Bernard s’abattant sur ma carcasse,
Lorsque j’aperçois un bocal où rien ne bouge.

Je me résigne alors, moi le chienchien fidèle,
Pars bouder dans mon panier tenir la chandelle :
Mon maitre a acheté un affreux poisson rouge…

Vieillir

Rondel (Octosyllabique – A1/B2/B/A – A/B/A1/B2 – A/B/B/A/A1)

Elle est tout-à-fait indolore,
Surprend au détour d’une nuit,
S’affiche peu à peu sans bruit,
Griffe mais aussi décolore.

C’est la vieillesse qui, dès lors
Vous agrippe et tout déconstruit,
Elle est tout-à-fait indolore,
Surprend au détour d’une nuit.

Encore épargné jusqu’alors,
Désormais elle vous poursuit,
Sûrement elle vous conduit
Ailleurs où rien ne peut éclore
Elle est tout-à-fait indolore.

Nouvelle année

J’ai envie de vous dire à tous « Bonne année » mais ce serait se voiler la face : chacun sait qu’elle sera ponctuée de difficultés, d’épreuves dans le pire des cas. Rien dans ce bas monde ne s’écoule avec fluidité et sans heurts…
Alors je pourrais vous souhaiter une année meilleure que la précédente. Peu de risque à formuler un tel vœu… Mais… que signifie « meilleure » ? À quel niveau se situe cette notion-là ? Sur quels critères pourrais-je décider que la nouvelle année fût meilleure que celle évincée ? Des critères quantitatifs, qualitatifs, certes, mais lesquels ? Réponse on ne peut plus subjective car chacun place le curseur à des niveaux de priorités différents. La vérité est multiple…
Par ailleurs, le bruit court que les écueils constituent autant de passages obligés : s’enrichir ainsi sur le plan personnel, mais aussi prendre le recul nécessaire pour comprendre la Vie et le sens de notre existence. Gagner peut-être en sagesse ? Transmettre, (pourquoi pas ?) à qui veut bien l’entendre, ce que nous aurons appris ? Non, ce genre d’héritage n’existe pas, car rien ne s’apprend en dehors de toute expérience, quelle qu’elle soit.
Mais qu’entend-on par sagesse ? Elle n’exclut pas un brin de folie, d’excentricité, de révolte. Elle marche main dans la main avec la liberté.
Bon… Vous l’aurez compris, je me suis perdue dans mes réflexions… Ce qui devait être rédigé brièvement prend des allures de pavé. Une chose est certaine, c’est que je n’ai pas gagné en concision depuis hier. Normal : le temps n’existe pas, c’est une invention de l’Homme.
Mais stop ! J’arrête là, car je m’égare de plus en plus et il est fort probable autant que compréhensible que vous ayez décroché depuis longtemps…
Quoi qu’il en soit, une chose est certaine, je vous souhaite d’être aimé et d’aimer. Car l’amour est le moteur de la vie. Sans amour, on n’est rien, on n’a aucun espoir. C’est pour lui et grâce à lui que bat notre cœur, il coule dans nos veines. C’est le piment de nos jours, le soleil dans nos yeux, la confiance dans l’avenir. Par opposition à certaines vérités qui ne le sont qu’observées sous certains angles, l’amour est une vérité, universelle, intemporelle et qui ne peut être remise en question.
Alors, c’est vraiment ce que je vous souhaite : donner de l’amour et en recevoir.