L’écrivain

 

Quelques mots réunis, somme toute banals,
Voilà pourtant un poème qui voit le jour.
Quelconque ? Non, car il agit comme un fanal,
Un appel à le dévoiler qui émeut toujours.

Qui se cache ou au contraire se découvre
Derrière cet entrelacs de phrases, de pages ?
Sur le seuil de la première ligne s’entrouvre
Un monde fabuleux : la magie du langage.

Bien sûr, quelqu’un se tient là, derrière le rideau,
Tel un maestro ou encore un marionnettiste.
Sur la mer des alexandrins, jetant son radeau,
Voici venir l’écrivain, mystérieux alchimiste.

Tout le nourrit : ce qu’il voit, perçoit et respire
Apporte les ingrédients de ses créations.
Métamorphosant les émotions qui l’inspirent,
Ce magicien débride son imagination.

De tous les émois, il en est le réceptacle,
Devient un réservoir inépuisable de rêves.
Sa grande sensibilité, portée au pinacle,
Peut pourtant le blesser, agissant comme un glaive.

Il jongle avec les mots, joue à l’équilibriste
Avec leurs rimes qui impulsent la cadence.
Il plonge avec délice dans ce jeu de piste,
Seulement guidé par leurs infinies nuances

Parfois étonné par son inventivité,
Mais exigeant dans la quête de la perfection.
À d’autres moments, manquant d’objectivité,
Sûr d’être abandonné par son inspiration.

Posant enfin sa plume avec soulagement
Autant qu’avec regret, il en a terminé.
Son écrit nous emmène vers des raffinements
Où, médusés, nous nous laisserons fasciner.

De vers ou de prose, surgit un paysage,
Source d’émerveillement pour chaque lecteur.
L’écrivain a gagné son pari : un passage
Au cœur même des émotions de son visiteur.